INTENTION
MARS 1918, les obus anglais pleuvent sur Bailleul. La ville, située à l'arrière
du front d'Ypres, tout juste prise par les Allemands, est anéantie. Parmi les
gravats, ceux du musée Benoît De-Puydt. 80% des collections sont perdues,
détruites ou dispersées. Dès 1919, dans la ville en reconstruction, le musée
reconstitue lentement ses collections.
DANS LES ANNÉES 1990, Laurent Guillot, conservateur de 1989 à 2000, retrouve
des carnets de son confrère, Edouard Zwynghedauw, conservateur jusqu'en 1912 ;
il a méticuleusement décrit les 7500 tableaux de ''son'' musée.
EN 2013, le musée présente 31 tableaux-fantômes du leg Hans dans une
salle du premier étage. Les œuvres de Pharaon Dewinter, Fantin-Latour et autres
ne sont plus que quelques lignes poétiques présentées dans le format de la
toile disparue. Nostalgie !
DE 2014 À 2018, proposition est faite à des artistes d'aujourd'hui de
réinterpréter ces tableaux-fantômes à partir de la description d'Edouard
Zynghedauw. Renaissance !
LUC HOSSEPIED [ la plus
petite galerie au monde (ou presque), Roubaix ]
RÉPONSE
19/092015
[en réponse à une invitation ferme et sérieuse, même si la table à Roubaix était belle et joyeuse en ce début septembre. Je récupérais enfin ce soir là mes quatre photographies de la Condition Publique en travaux, exposées à la PPGM l'année dernière]
Cher Luc
Les quelques jours de réflexion étant passés,
je te prie de recevoir mon acceptation, ou ma candidature comme tu l'entendras,
à ce superbe projet autour des "tableaux fantômes" du Musée
Benoit-De-Puydt de Bailleul. Tu connais le photographe, l'historien aussi,
peut-être un peu moins le joueur de mots et de poésie en vidéo que j'essaie
d'être parfois. Je me dis qu'il y a en effet matière à faire tout cela, sans
encore avoir tout à fait d'idée
définitive bien entendu sur la forme nécessaire.
J'ai trouvé le premier dossier de presse en
ligne, quelques articles, la photo du
mur où sont les légendes de l'inventaire d'Edouard Swynghedauw accrochées aux
cimaises, une vidéo forte et troublante de l'incendie et de la chute...
Il y a beaucoup à penser, à dire et à montrer
de cette tension entre la disparition , les œuvres elles-mêmes, leurs
"fantômes", les différents niveaux de représentation, dont l'histoire-même
a commencé lors de la rédaction scrupuleuse de l'inventaire par un
conservateur talentueux.
C'est en soi déjà un très beau sujet
d'histoire et d'histoire de l'art. Tu as su en voir avec d'autres la force
poétique. Il y a donc beaucoup à penser,
à dire et à montrer de cette possibilité contemporaine d'en faire non seulement
une renaissance mais surtout une projection et du sens.
Je serai vraiment fier de participer à la
prochaine étape si tu (vous) le souhaite(z)
A très vite
Bises
Jean-Louis
MISE EN OEUVRE
Penser la
photographie, aller la faire en n’étant pas encore tout à fait fixé sur le
tableau élu. Pour la première fois, sentir cette série d’images à faire en
fonction d’un cahier des charges qui donnerait à la fois mémoire d’une œuvre et
d’un lieu et projet pour nos jours. Entre les deux la destruction et l’oubli,
la violence et la mort, jusque précisément en nos jours, puis ce qui ne doit
pas être oublié de la culture et de la beauté données tous ces temps.
Chercher un
peu ailleurs, se demander comment faire. Envisager un moment autre chose autour
du texte. Trouver en ligne cette liste officielle des mémoriaux de toutes les
guerres. Se proposer de passer des tableaux fantômes à ce tableau des fantômes.
Puis revenir à l’image seule, pour ce moment-ci. Savoir cependant, parce que moi-même
souvent : cela sera du paysage.
Alors à lire
les notices de Swynghedauw, repérer une lande et puis un autre paysage, d’un
nantais celui-ci. Creuser cette idée commune des ombres et des lumières, des
herbes et du ruisseau, de l’horizon plus ou moins fort, d’un paysage plus ou
moins habité, plus ou moins paisible.
Donc, parce
depuis longtemps arpenté, venir à Oudon aux bords du Havre. Ce lieu dit tout
cela des ombres et des lumières. Penser à ces arbres et à l’étang à côté. Plein
automne, barrières ouvertes, les vaches ne sont plus là. En face un pécheur
avance doucement, quelques poules d’eau, un cormoran qui pèche. S’arrêter au
pourpre des cyprès chauves et voir le tableau, désormais choisi.
Mais si la
mort donnée de quelle paix parle-t-on ?
Le Havre à
Oudon, havre de paix mais où donc ?
Paysages et
animaux
Jean-Louis Kerouanton, 13/11/2015 et tout autour
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